L'association Kwata travaille depuis le début des années 2000 à une meilleure connaissance du lamantin en Guyane. Mais les eaux troubles de Guyane font des estuaires et des zones littorales des zones particulièrement difficiles à étudier.

En particulier les lamantins qui ne daignent dévoiler, même aux observateurs les plus attentifs du littoral, qu’un dos, un museau ou au mieux sa nageoire caudale.

Après des années d'études des informations nous manquent encore… Quelles sont les zones de repos des lamantins ? de déplacements ? leurs domaines vitaux ? Où vont-ils manger ? Combien de temps y passent-ils par jour ? Autant de questions pour lesquelles nous n'avons pas de réponses, pourtant nécessaires pour savoir protéger ce mammifère aussi imposant que discret et fragile.

Grâce aux contributeurs nous pourrons financer la capture de deux lamantins aux abords d'un village amérindien de la côte guyanaise, Awala-Yalimapo et, avec la pose de balises Argos, suivre leurs déplacements pendant près d'un an. Ce suivi sera accompagné d'un projet pédagogique avec l'une des classes du village.

Avec une taille et un poids pouvant atteindre 4m et 800 kg, le lamantin est l'un des plus gros mammifère d’Amérique du Sud, et l'un des moins connus.

Intégralement protégé et classé comme vulnérable au niveau mondial et en danger à l'échelle régionale, les lamantins ont toujours subi de nombreuses menaces (pêche, braconnage, collisions avec les embarcations rapides,…). Par leur apparence physique et leur discrétion, ils ont toujours suscité la fascination des communautés qui les côtoient …

Pour certaines communautés amérindiennes, le lamantin représente l'esprit de l'eau, le Molokoï : la légende dit qu'une jeune femme, par chagrin et désespoir amoureux se serait jetée dans le fleuve et transformée en lamantin. Depuis, on lui attribue enlèvements, noyades et accidents de pirogues comme vengeances du passé.

Dans la culture occidentale aussi le lamantin a été associé à de mythiques histoires … Au 15ème siècle, les marins des conquistadors, après quelques verres de rhums, beaucoup de fatigue et certainement pas mal d'abstinence, ont cru y voir de paisibles sirènes, ces créatures envoûtantes de l'océan.

Strictement herbivores, les lamantins ont besoin d'une grande quantité de ressources alimentaires de bonne qualité. Placides, peu rapides, ils ne supportent pas les dérangements trop importants. Ce ne sont pas non plus de grands voyageurs comme la plupart des mammifères marins, ils sont donc attachés à une région côtière, à un estuaire, un lagon,… dont ils témoignent par leur présence du bon état de préservation.

Comme pour la plupart des espèces qui fréquentent le milieu marin côtier de Guyane, très peu d’informations sont disponibles sur le lamantin. Au début des années 2000, l’association avait mené un travail d’enquête qui avait permis de récolter des informations sur la répartition de l'espèce.

Depuis 2010, grâce au soutien financier du Ministère de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement l'étude sur le lamantin a été relancée. Dans le contexte guyanais, les survols aériens pour compter le nombre d'individus, sont impossibles à mettre en œuvre. Il était donc indispensable de trouver d’autres techniques permettant le recensement de l’espèce. L’une d'entre elles, déjà utilisée dans plusieurs pays (Mexique, Colombie, Brésil), est celle du sonar.

Près de 1000km de fleuve ont été parcourus. Ce travail a permis d'identifier les zones préférentiellement utilisées et de commencer à entrevoir des variations saisonnières dans l'utilisation des habitats.

"Contez-nous le lamantin" s'est déroulé entre 2014-2015 sur 4 communes de Guyane et a permis de sensibiliser plus de 150 enfants.

L'aboutissement de ce projet a été la rédaction par les élèves de contes et légendes autour du lamantin. L'ensemble des contes a été intégré dans un livret pédagogique à disposition de tous les enseignants de Guyane et téléchargeable par tous sur notre site internet.

Le projet rentre dans une nouvelle phase : le suivi "à distance" de quelques individus, afin de mieux comprendre les modalités d'utilisation des habitats. Les captures se feront en partenariat avec une équipe brésilienne (INPA/FMA) déjà impliquée dans ce type de mission, et avec les pêcheurs amérindiens de la commune.

Une fois l'animal relâché, le suivi se fera à distance et en temps réel grâce au suivi satellite par le système Argos. Si toutefois, les animaux sont régulièrement observés dans des zones accessibles, l'équipe se rendra sur place pour tenter des observations directes des animaux suivis, évaluer si possible l'état du matériel et décrire les zones fréquentées.

Le lamantin, suivi d'un animal mythique de Guyane

Le lamantin, suivi d'un animal mythique de Guyane